www.rd-rail.fr

Ile-de-France - Le RER au quotidien

Performance, ponctualité et information sur le RER francilien

(01) Introduction - les difficultés du RER en Ile-de-France
(02) La dispersion des comportements de conduite : un cas d'école sur le RER-D
(03) Les conflits entre RER-B et RER-D entre Châtelet-Les Halles et Paris Nord
(04) Le bêtisier de l'affichage


(01) INTRODUCTION - LES DIFFICULTES DU RER EN ILE-DE-FRANCE

D'une manière générale, on ne va s'intéresser ici qu'aux petites variations du quotidien, pas aux gros incidents... les plus fréquents de ceux-ci étant les signaux d'alarme, justifiés ou non (environ 8000 par an en Ile-de-France sur l'ensemble du réseau Transilien), ainsi que les colis suspects ou bagages abandonnés, et les malaises ou accidents de voyageurs. Côté infrastructure (officiellement 15 à 20 % des minutes perdues - il reste à voir selon quels critères précis), pas d'analyse statistique précise ici, mais les pannes de signalisation tiennent visiblement le haut du pavé, devant les problèmes d'alimentation électrique et les sujets "voie" (rail cassé, problème sur un aiguillage...). Dernier volet de la "galère" quotidienne du Francilien client du RER, les pannes de matériel roulant, logiquement fonction de l'âge de celui-ci, avec des RER B C D peu avantagés de ce point de vue. Au final, le constat est simple : on sait en général quand on part, mais on ne sait jamais quand on arrive... La comparaison avec un séjour de 6 mois à Francfort en 2015, avec utilisation quotidienne de la S-Bahn (équivalent local du RER, avec un train toutes les 2mn30s dans le tunnel central) est édifiante : de très nombreux retards de 1 à 5 mn, mais seulement deux incidents sérieux en 6 mois, avec environ 20 mn perdues dans les deux cas : une panne de signalisation, et... un cerf-volant dans la caténaire.

(02) LA DISPERSION DES COMPORTEMENTS DE CONDUITE : UN CAS D'ECOLE SUR LE RER-D (02.04.2017 rév. 17.05.2018)

CORBEIL - BOIGNEVILLE / Illustration chiffrée de la dispersion des comportements de conduite :

Les meilleurs temps au 17.05.2018 : 31mn16 / 31mn17 / 31mn45 / 31mn48 / 31mn53 / 31mn55
(sur 88 parcours)

Les moins bons temps au 17.05.2018 : 37mn10 / 38mn05 / 38mn06 / 38mn20 / 38mn51 / 40mn45
(sur 88 parcours)

Le graphique illustrant le phénomène est ici et la suite de ce texte l'explique...

Les conducteurs de trains ne sont pas des robots, et ne conduisent pas tous de la même façon... ne serait-ce qu'à cause d'une histoire personnelle très variable, qui peut être faite de chocs émotionnels (accidents de personnes...), de directives hiérarchiques évolutives, d'une clientèle indisciplinée sur les quais... sans parler de la performance également variable du matériel roulant et des installations fixes, en particulier l'alimentation électrique.

Ce que montre ce sujet n° 1, sans porter de jugement mais en fournissant des éléments de compréhension, c'est que la dispersion des temps de parcours, dans des conditions a priori stables, peut être extrêmement élevée.

Condition initiale : trouver une ligne et des conditions d'exploitation qui permettent de mettre en évidence le phénomène de manière nette, c'est-à-dire avec une influence faible à nulle de tous les facteurs autres que la conduite.

En Ile-de-France, pour trouver un tel contexte, il faut s'éloigner de Paris, car dans la partie la plus dense du réseau, les trains se gênent les uns les autres, partageant non seulement les mêmes voies mais aussi une même alimentation électrique, dans des conditions qui peuvent être difficiles à évaluer avec précision. Mais à 30 km ou plus de Paris, les RER sont parfois assez seuls sur leurs voies, et l'analyse devient alors possible.

La ligne étudiée ici est celle de Corbeil à Malesherbes, qui est l'une des branches Sud du RER-D... avec un changement prévu fin 2018 : plus de trains directs depuis Paris, les missions Malesherbes partiront toutes de Juvisy. Toujours est-il qu'actuellement l'exploitation aux heures de pointe du soir présente toutes les qualités requises :

  • un train tous les quarts d'heure, avec une infime probabilité de succession rapprochée, ces trains étant séparés par 3 autres missions entre Paris et Villeneuve-St-Georges : une fois sorti du noeud de Corbeil, le train ne rencontrera que des signaux à voie libre, tout au moins jusqu'à Boigneville, dernier point d'arrêt avant Malesherbes,

  • et justement, la destination finale est Boigneville... juste avant un éventuel risque "espacement", car un train entrant à Malesherbes qui serait bloqué en entrée de gare par un train sortant va se traduire, pour le train qui le suit, par un signal à l'avertissement juste au-delà du quai de Boigneville : aucun impact ici, puisque la fin du parcours étudié est justement Boigneville,

  • pas de fret aux heures de pointe, et seulement un RER à la demi-heure dans le sens Sud - Nord : les conditions d'alimentation électrique sont donc assez stables, surtout avec des sous-stations relativement rapprochées comme c'est toujours le cas sous 1500 V (il se dit cependant ces temps-ci que l'une d'entre elles fonctinne plus ou moins bien, et que la tension en ligne descend parfois à 1200 V...). Ce facteur est, avec la chaîne de traction des rames (cf. ci-dessous) le seul réellement non maîtrisé dans cette étude.

  • un matériel roulant standard (Z 20500 en UM alias Unités Multiples)... mais avec parfois un ou des blocs moteurs hors service, cela ayant un impact certain sur les accélérations mais pas sur la tenue des vitesses limites, modestes (110 km/h de Corbeil à La Ferté-Alais, 100 ensuite) et faciles à tenir jusqu'à Boigneville, sur cette ligne de fond de vallée,

  • une maîtrise aisée des temps de stationnement, parce que les trains se sont déjà bien vidés à Corbeil, et les montées de voyageurs en cours de route sont limitées.
Il y a par ailleurs d'autres exigences, afin que la variabilité des temps de parcours ne dépende que de la conduite :
  • un rail sec, pour des conditions d'adhérence égales pour tous les trains observés,

  • un train en retard durant tout le parcours, pour que la conduite soit obligatoirement la plus rapide possible (cela implique un retard d'au moins 5 mn à Corbeil).
Le graphique joint (obtenu par "détournement" du logiciel des dessins de profils de lignes) montre, pour des parcours respectant donc toutes les conditions ci-dessus, le temps de parcours réel entre Corbeil et Boigneville, le temps prévu à l'horaire étant de 36 mn (2160 s). L'échelle a été augmentée, par soustraction de 999 s à toutes les valeurs.

Le résultat est effarant : on constate un écart de plus de 7mn30 entre le parcours le plus rapide (31mn16) et le plus lent (38mn51, en considérant comme une anomalie non significative le récent temps de 40mn45). Plus significatif encore, 6 temps sont inférieurs à 32 mn, et 6 autres supérieurs à 37. On se situe donc sur une dispersion "courante" de 5 mn pour un temps de parcours de 36 mn. Autre constat : 16 des 88 temps de parcours excèdent les 36mn00 du temps de parcours standard, marge de régularité incluse, ce qui signifie que près de 20 % des trains voient leur retard, pourtant déjà substantiel, augmenter sur un parcours plutôt facile et avec une météo favorable. Les gestionnaires de la ligne en ont-ils conscience ?

Une précision importante... Le terme "effarant" employé ci-dessus peut paraître extrême, mais il ne faut pas oublier que la marge de régularité standard en Ile-de-France est de 5 % du temps, soit ici... 1mn48s, qui sont à comparer à cette dispersion d'au moins 5 mn. On comprend alors mieux qu'un retard ne soit pas toujours rattrapé, ou très partiellement... Et on peut également penser que, pour éviter des trains systématiquement en retard, il existe donc nécessairement de la marge cachée sous d'autres formes (arrêts longs, calcul du temps de parcours avec une alimentation électrique légèrement dégradée, aptitude de freinage de la rame minorée, charge en voyageurs majorée...), ce qui va se confirmer en analysant ci-dessous les composantes de cette dispersion.

Pour mémoire, il ne s'agit pas ici de critiquer mais plutôt de comprendre, et le lecteur se rendra vite compte de la multiplicité des causes. Pour autant, l'expérience de l'auteur appuyée sur de nombreux chronométrages peut citer deux pays où l'on ne se situe absolument pas, dans des conditions par ailleurs comparables, à ce niveau de dispersion : la Suisse et l'Allemagne.

Il ne faut certes pas oublier que toutes ces mesures ont été faites dans de bonnes conditions d'adhérence, et que la "vraie vie" est souvent différente... Il paraît donc possible de réduire la marge de régularité réelle (marges cachées incluses), mais une certaine prudence s'impose. Il n'en reste pas moins que l'immense problème derrière cette dispersion, qui bien sûr existe tout autant en zone dense, est qu'elle a des conséquences négatives directes : une moins bonne ponctualité (les retards pris dans la partie la plus dense du réseau sont moins bien résorbés), une perte de capacité du réseau, et un besoin d'investissements "de compensation" pour justement rétablir cette capacité perdue. Ce n'est pas spécialement critique aux marges du réseau si le temps prévu pour le demi-tour à Malesherbes est suffisant (c'est bien le cas), mais au coeur du réseau, c'est une autre affaire... Ce n'est donc pas un hasard si l'on prévoit aujourd'hui d'automatiser un jour la conduite sur les sections centrales des RER parisiens (sur le D, ce sera entre Stade-de-France-St-Denis et Villeneuve-St-Georges) : automatisation signifie avant tout éradication de la dispersion...

Détaillons maintenant les causes élémentaires du phénomène...

Un temps de parcours se décompose essentiellement comme suit :

(1) La phase d'accélération
(2) La phase de vitesse(s) stabilisée(s)
(3) Le freinage
(4) Le temps de stationnement

dont la variabilité de chacune impacte plus ou moins fortement le temps de parcours global.

(1) L'accélération :

Le matériel roulant étant homogène (nonobstant les blocs moteurs isolés évoqués plus haut), les variations sont ici assez faibles dans la mesure où l'on se restreint volontairement aux situations où l'adhérence est bonne (rail sec, absence de feuilles mortes...). Parmi les 4 composantes ci-dessus, c'est celle où la dispersion est la plus faible... hormis au départ de Corbeil, gare dont le plan de voies est presqu'entièrement autorisé à 60 km/h. Car on peut déjà laisser filer de nombreuses secondes... :

  • en restant aux alentours de 30 km/h le long du quai,

  • et ensuite, en roulant en-dessous de 60 km/h jusqu'à la fin de la zone,

  • enfin, en accélérant plus tardivement que le point possible de reprise de vitesse, situé un peu moins de 300 m après les derniers aiguillages, la longueur d'une rame double standard étant de 259 m. Il ne s'agit en général pas d'un manque d'attention, mais d'une certaine prudence vis-à-vis du comportement du contrôle de vitesse KVB : crainte d'une "prise en charge", autrement dit déclenchement d'un freinage d'urgence suite à la détection d'une vitesse jugée excessive (qui n'est pas forcément une erreur de conduite, cela peut aussi être un défaut de programmation du KVB !).
La combinaison de ces 3 facteurs génère couramment 1/2 minute de dispersion, sur un temps de parcours de 3 mn, entre Corbeil et Moulin-Galant.

(2) La phase de vitesse stabilisée :

Cette phase est très simple dans son application : il n'existe que deux taux de vitesses limites, à savoir 110 km/h de Corbeil à La Ferté-Alais et 100 km/h de La Ferté-Alais à l'entrée de Malesherbes. Pas le moindre point singulier entre la sortie de Corbeil à 60 et l'entrée à Malesherbes à 50 (celle-là est hors sujet ici de toute façon). Une tenue "prudente" des vitesses limites a tout de même un petit impact, car certaines interstations sont assez longues (6,6 km entre Mennecy et Ballancourt, 5,8 entre Ballancourt et La Ferté-Alais, 6,6 km entre La Ferté-Alais et Boutigny) et les vitesses limites sont tenues assez longtemps avec un matériel à forte accélération comme ici. En supposant, pour simplifier, 3x4km parcourus à 100 km/h au lieu de 110 (ce qui est compté large...), on est sur une perte de temps d'une demi-minute environ, à raison de 3 s par km : ce n'est donc pas ici que l'essentiel se passe...

A noter : la précision de l'indicateur de vitesse est un facteur dont l'influence n'est évidemment pas maîtrisée. Mais les gros écarts à ce niveau sont rares, et c'est de toute façon un sujet mineur sur un parcours à arrêts fréquents.

(3) Le freinage :

On est ici dans des variations nettement plus importantes que précédemment. Le freinage a lieu plus ou moins tôt, selon :

  • la perception de l'adhérence (sujet limité ici, comme pour l'accélération, par le contexte "mesures faites uniquement avec rail sec"),

  • le contexte local, autrement dit la perception du risque en cas d'arrivée rapide : train visible de loin ou non, et à l'inverse vue ou non de la totalité du quai par le conducteur ; mais aussi le volume de clientèle à quai et le comportement de celle-ci, même si ici le nombre de voyageurs montants est toujours faible,

  • l'expérience du conducteur (autrement dit, sa bonne connaissance de la ligne... et de la capacité de freinage du matériel roulant).
Constat pratique : on observe couramment ici une dispersion de 15 s par arrêt, soit 1mn45 environ pour les 7 arrêts du parcours (Boigneville exclue).

(4) Le temps de stationnement :

C'est ici que se situent les plus gros écarts... et la manière la plus facile de gagner du temps, les arrêts au sud de Corbeil étant tous calibrés à 40 s : avec peu de voyageurs descendants (surtout au-delà de Ballancourt) et encore moins de voyageurs montants, cela excède largement le strict besoin. Le fait que le matériel roulant (2 portes par voiture seulement, et plancher situé largement au-dessus du quai) soit peu favorable à des descentes rapides n'est pas critique ici. Après Ballancourt, on observe couramment des arrêts de moins de 20 s, voire 15 à Buno-Gironville et Boigneville (record à battre : 11 s à Boigneville... et là, mieux vaut déjà se tenir à proximité des portes lors de l'arrêt !).

En pratique, des arrêts de 30 s au sud de La Ferté-Alais seraient largement suffisants. Pour autant, il ne faut pas oublier le besoin de prévoir des aléas occasionnels (obstruction à la fermeture des portes, d'où le besoin de répéter la séquence de départ, avec de ce fait une perte de temps d'au moins 15 s...) ou le simple fait que quand il pleut les montées ou descentes de voyageurs sont toujours un peu plus lentes... On peut donc estimer qu'il y a une demi-minute gagnable ici, mais guère plus : on ne se situe pas du tout à la hauteur de la dispersion globale observée.

Sur les stationnements toujours, il est en revanche un autre point moins visible mais dont l'impact n'est pas négligeable : le comportement de conduite au départ. On observe typiquement deux attitudes bien distinctes :

  • les conducteurs qui desserrent les freins une fois les portes fermées : ceux-là partent en moyenne 8 s après la fermeture des portes,

  • ceux qui interprètent la règle de façon plus souple (celle-ci exigeant simplement l'immobilisation de la rame), savent que l'on parcourt une ligne de fond de vallée où tous les points d'arrêt sont en palier, et desserrent les freins pendant et non après la fermeture des portes : ceux-là partent en moyenne 2 s après cette fermeture. Cela n'a l'air de rien, mais si l'on multiplie cet écart de 6 s par le nombre d'arrêts, on parvient tout de même à un écart de 42 s sur les 7 arrêts (Boigneville exclue)...
Pour l'anecdote, le même comportement à Chilly-Mazarin (RER-C, entre Juvisy et Massy-Palaiseau) verrait probablement la rame reculer de plusieurs dizaines de centimètres au démarrage : la ligne est en rampe de 10 °/°° à cet endroit, soit tout de même un écart d'altitude de 2 m entre l'avant et l'arrière de la rame (qui sur le RER-C comporte 8 voitures, soit une longueur de 200 m environ). A titre de curiosité toujours, le cas le plus spectaculaire dans ce domaine est la gare TGV de Bellegarde (Ain), en rampe de 25 °/°° pour des raisons d'insertion locale (elle correspond à un raccordement direct qui n'existait pas à l'origine) : là, l'écart d'altitude entre la tête et la queue d'une double rame TGV est de... 10 mètres !

Voici donc tous les éléments qui influent sur le temps de parcours et permettent de comprendre la dispersion mise en évidence par le premier des 3 graphiques visibles ici. Le propos n'est pas ici d'affirmer qu'on pourrait facilement s'aligner sur les meilleurs temps observés, mais simplement de noter qu'on a là un vrai sujet quand on se place dans la perspective des investissements qu'il faut consentir soit pour gagner du temps, soit pour améliorer la régularité... Il n'est alors pas surprenant que la conduite automatique soit inéluctablement destinée à s'imposer dans les parties les plus chargées du réseau francilien...

(03) LES CONFLITS ENTRE RER-B ET RER-D ENTRE CHATELET-LES HALLES ET PARIS NORD (01.06.2018)

Ici, le constat est que la gestion non optimale d'une gare (Paris Nord RER, ou Gare du Nord en langage RATP...) engendre au quotidien, hors gros incidents, une perte de temps substantielle, stable... et parfaitement évitable. Avec au passage la confirmation de l'inutilité complète d'un second tunnel entre Châtelet-Les Halles et Paris Nord : il suffit d'exploiter autrement...

Constat factuel : le voyageur du RER-B qui voyage au quotidien le matin entre le Sud et le Nord de la ligne, disons de Gif-sur-Yvette et La Plaine-Stade-de-France, n'a aucune chance d'arriver à l'heure à destination, sauf en tout début de pointe (départ de Gif vers 7h00). En milieu de pointe (départ de Gif vers 7h30), le tarif habituel sera de 5 mn de retard à Aulnay, et plutôt de 10 en fin de pointe (départ de Gif vers 8h00). Ce n'est donc pas une question de temps de parcours, puisqu'être ponctuel est possible en tout début de pointe, avec des trains déjà bien remplis et donc des temps de montée des voyageurs qui sont déjà une réelle contrainte.

Cette dispersion entre Gif-sur-Yvette et La Plaine-Stade-de-France est visible ici. La variabilité des temps de parcours rend ce graphique un peu difficile à lire, mais la tendance à l'augmentation de ceux-ci est nette entre le début et la fin de la pointe...

L'habitué de la ligne sait bien que cela "commence à coincer" avant Paris, et ce de plus en plus loin de Paris au fur et à mesure que l'heure avance. Le réflexe naturel est d'attribuer cette dérive à la convergence avec le RER D à Châtelet-Les Halles. De fait, les 32 trains par heure entre Châtelet et Paris Nord semblent être une convaincante explication. Sauf qu'exploiter 32 trains par heure sur un tronc commun sans aucune gare intermédiaire et deux voies par sens aux extrémités est en réalité bien plus facile que les 30 trains par heure du RER A entre La Défense et Vincennes, avec 6 arrêts dotés d'une seule voie par sens de circulation : ce n'est pas un hasard si la RATP a installé SACEM dès les années 80 et améliore encore le dispositif aujourd'hui...

Alors ? Eh bien, Tout se passe en réalité à Paris Nord, et à peu près de la même façon dans les deux sens de circulation : du Nord vers le Sud, les RER-B s'empilent à partir de La Plaine-Stade-de-France, bien davantage que les RER-D à partir de Stade-de-France-St-Denis : il faut couramment de 8 à 10 mn en pointe pour parcourir cette interstation RER-B, pour un temps nominal de 4mn30 marge incluse...

Cette dispersion entre La Plaine-Stade-de-France et Paris Nord est visible ici. La base du graphique figure un temps de parcours nominal de 4mn30 qui n'est donc presque jamai atteint, et on ne peut qu'être frappé par la dispersion des temps de parcours...

Et la cause est la même dans les deux sens : la pratique seulement très occasionnelle de l'alternat. Autrement dit, le schéma de base est que "chacun reste chez soi" : les RER-B sur leur voie, les RER-D sur la leur. Comme les premiers sont au nombre de 20 par heure et les seconds seulement 12, il y a perte de temps, du fait de la durée du stationnement, dès que deux RER-B se suivent, autrement dit 8 fois par heure... Dans le sens Nord - Sud, cela ne serait pas irrémédiable en soi s'il y avait systématiquement départ sur avertissement pour dégager le quai aussi vite que possible, mais c'est loin d'être le cas, et ce l'est d'autant moins que la flèche lumineuse qui indique que l'itinéraire est tracé incite plutôt à attendre... à contresens de ce que son rôle devrait être.

Le sujet avait d'ailleurs été théorisé il y a quelques années (mars 2014) par Le Rail, une revue aujourd'hui disparue, dans un article où l'on pouvait notamment lire qu'une succession fortuite d'une dizaine de trains en alternat naturel (B/D/B/D/B/D etc...) avait permis un intervalle moyen de 1mn42 (35 trains/heure) alors que pour 32 l'intervalle requis est d'1mn52,5s. Ce n'est certes pas une démonstration absolue, mais au moins une indication... surtout quand dans la pratique on n'observe pratiquement jamais de succession de deux RER-B en moins de 2mn30.

Commentaires ultérieurs (13.04.2020) :

  • même si, à elle seule, elle est très loin d'être la solution au problème, une mesure très positive prise fin 2019 à Paris Nord a été d'inverser le sens des deux escaliers mécaniques les plus au Sud, pour l'accès au quai direction Sud : ce sont eux qui sont le premier accès quand on vient du métro (hors Ligne 2) ou de la gare Grandes Lignes et TER, et l'afflux de voyageurs les utilisant se concentre sur les premières portes du train, la situation étant pire sur le RER-D (plus capacitaire et muni de seulment deux portes par voiture) que sur le RER-B. Le report de la descente une vingtaine de mètres plus loin est donc bénéfique pour la répartition des voyageurs et le temps de stationnement,

  • à Paris Nord direction Sud toujours, le bilan de la mise en place de l'IVAD (Indicateur Visuel d'Aide au Départ), un triangle lumineux dont l'allumage indique au conducteur que l'itinéraire est défini pour lui et qu'il sera donc le premier à pouvoir partir, est mitigé. La raison en est qu'un départ imémdiatement après l'allumage de l'IVAD est mieux que d'attendre "voie libre" (signal au vert) mais beaucoup moins bien que de partir sur avertissement (signal au jaune), parce que l'objectif majeur est de dégager le quai le plus rapidement possible pour le train suivant. Bref, on n'y est pas encore... car les conducteurs attendent désormais presque systématiquement l'IVAD, alors qu'auparavant certains partaient bien sur avertissement...

(04) LE BETISIER DE L'AFFICHAGE


On trouvera ici un certain nombre d'exemples d'affichages parfois hors sujet et souvent absurdes ou en tout cas ne répondant pas au besoin d'information de la clientèle. Pas de systématisme ici, mais à coup sûr l'impression que l'informatique associée est mal maîtrisée (il peut certes y avoir des sujets de positionnment de balises de détection, mais éviter d'aficher deux trains arrivant en même temps sur la même voie est un pur sujet informatique... assez trivial de surcroît !), mais aussi que le processus de remontée des observations faites sur le terrain est soit virtuel soit défaillant - ce qui peut aussi recouvrir l'éventualité que les agents présents sur place renoncent à fare de tels signalements parce que ceux-ci sont peu, pas du tout, ou très lentement pris en compte...

Paris Nord RER B+D

Le chemin de fer fait certes "gagner du temps sur le temps", mais deux trains à l'approche en même temps sur la même voie, est-ce bien crédible ?

On notera aussi le bandeau de texte en anglais, ce qui est très bien, mais pour les annonces sonores dans la même langue, particulièrement pour la clientèle à destination de l'aéroport Charles-de-Gaulle, il faudra repasser...

















Ici, rien de spécial à signaler... On est à Juvisy côté RER-D, et l'incident signalé concerne bien ce même RER-D...

.

.

.

.

.

.

.

.














... mais 9 secondes plus tard, sur exactement le même affichage, on nous parle maintenant d'un incident RER-C ! Sans bien entendu préciser qu'il s'agit du C et non du D, ce qui pourrait rendre l'information légitime si elle est importante.

.

.

.

.

.

.














Boigneville (RER-D, dernier point d'arrêt avant Malesherbes)

Dans la même veine qu'à Paris Nord ci-dessus, mais plutôt pire pour une desserte dont la fréquence à cette heure et dans ce sens est de 30 mn, on a nouveau ici deux trains simultanés... mais en plus, une mission courte et une longue... En fait, avec le train retardé, on a ici deux trains imaginaires...

.

.
















A Massy-Palaiseau, la nouvelle passerelle entre les RER B et C est un progrès considérable, en revanche l'affichage (des trains du C côté B, et vice-versa) est loin d'être à la hauteur. Ici, même si ce n'est pas dramatique, juste absurde, on notera l'affichage inutile de deux trains terminus...

Quant au bandeau inférieur, on ne voit pas bien le lien avec des missions à destination de Versailles-Chantiers (ce bandeau parle d'aller où, d'ailleurs ?).

















... et il y a bien pire : ici, à 8h02 côté RER-B, le RER-C de 8h10 vers Pontoise ne semble pas circuler...

.

.

.

.

.

.

.

.














... alors qu'il existe bel et bien, la preuve ici côté RER-C deux minutes plus tard ! Ce type d'oubli est non seulement quasi quotidien, mais en plus il est assez courant qu'il efface deux trains, celui de 8h10 et celui de 8h40...
Dernier point, non visible en photo, l'affichage côté C des trains du B donne les bons trains mais en général avec un horaire faux : inutile de vous précipiter pour un RER-B qui est apparemment dans 2 mn, car en réalité il est plutôt à 7 ou 8...

















Retour à Paris Nord RER B+D pour un grand classique : les trains dans le désordre. Ici, ce ne sont que les 3 derniers, mais quand ce sont les deux premiers, avec par exemple le premier dans 10 mn et le second dans 4 (cas vécu), l'écran TV du quai affiche celui dans 10 mn... à peu près jusqu'à l'entrée à quai du train annoncé dans 4 mn.


--- fin ---